Le Monde de Franquin
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La science du trait chez Franquin
 
Le banc public © Dupuis
 
Trois lucioles géantes dans la nuit. Deux amoureux sur un banc public. L’éclat d’un cuivre. Le décor est planté. Minimaliste, il se suffit à lui-même. Le halo de lumière pourrait évoquer une poursuite scénique. Pourtant, il n’en est rien. Personne ici ne se donne en spectacle. Aucune fausse note. Même le trombone, suspendu la tête en bas, a su se faire oublier. Et si l’élégant réverbère, finement ouvragé, nimbe cette quiétude de sa douce clarté, c’est seulement pour veiller  sur un îlot de tendresse à la manière d’un cocon protecteur. Brassens s’est fait le chantre des bancs publics. Franquin, lui, nous en fait partager l’ineffable, le sens du frisson. L’index de la jeune fille, arc-bouté sur une latte du banc, nous en dit plus long sur ses sentiments que ne saurait le faire aucun poète au monde. Avec sa faculté unique pour aller au fond des choses, Franquin a merveilleusement su traduire pareille émotion. Cette image nous fait toucher du doigt l’indicible, le non-dit, l’abstrait. En un mot, Franquin  trouble nos sens... Mais la visite n’a que trop duré. Il nous faut prendre congé. Sans déranger... Doucement, sur la pointe des pieds. Comme si nous n’étions jamais venus. Comme si nous émergions du pays des songes. Chut !... Les amoureux sont seuls au monde.