L'HISTOIRE


L'anthropométrie


Mesurer pour juger


En 1775, le pasteur suisse, Jean-Gaspard Lavater, rédige un essai sur la physiognomonie. Il propose d'identifier le caractère d'un individu à partir de l'observation de la mobilité de son visage.

Quelques années plus tard, le médecin allemand, François-Joseph Gall, s'oppose à Lavater. Ce n'est plus le visage qu'il faut observer mais le crâne qu'il faut tâter pour déterminer la personnalité d'un individu. En effet, ce crâne serait, selon lui, modelé par la forme du cerveau en fonction de la personnalité. La fameuse " bosse des maths " est née. C'est la phrénologie.

Dans la même lignée, le médecin italien, Cesare Lombroso, propose en 1885 sa théorie du criminel-né. Selon lui, le crime est le fait d'individus constitutionnellement voués à cela, que l'on peut repérer par des stigmates physiques ou morphologiques dont il suffit d'établir l'inventaire. Dès lors, des millions d'observations chiffrées seront recueillies sur les criminels dans toute l'Europe.
Par exemple, le poids du cerveau des honnêtes gens oscillerait de 1475 à 1550 g, alors que chez les criminels, il serait de 1455 g. Contre exemple consternant pour les scientifiques : le cerveau de Léon Gambetta ne pèse que 1160 g.

De telles théories ne sont pas si loin de nous. Elles ont conduit à des dérives racistes comme le nazisme.
Plus récemment, en 1965, la généticienne écossaise Patricia Jacobs annonçait la découverte d'un " chromosome surnuméraire Y " plus présent chez les criminels et les déficients mentaux. Cette théorie non fondée scientifiquement a été abandonnée en 1975.


Le bertillonnage


Alphonse Bertillon est un cancre à l'école, mais un scientifique dans l'âme. Un ami de son père, féru de phrénologie, dit de lui après avoir tâté son crâne : " outre la bosse du classement, Alphonse possède le sens de la série, ce sera un garçon ordonné et méticuleux "...

Bertillon entre à la préfecture de Police de Paris comme simple employé en 1879. Il recopie sur des fiches le signalement des détenus arrêtés dans la journée. Mais, selon lui, ce travail ne servira jamais à retrouver les récidivistes, tant les informations relevées sont médiocres et la photo mal prise.

Bertillon met donc au point un système de classement efficace et une prise de mensuration précise des délinquants. Cette nouvelle méthode d'identification des récidivistes fait de lui l'inventeur de la police scientifique. Une fiche anthropométrique est constituée pour chaque personne arrêtée.

Dès 1883, Bertillon utilise des outils anthropométriques pour effectuer 11 mesures anatomiques par délinquant. Succès immédiat : 49 récidivistes sont retrouvés et 241 le seront un an plus tard. Dès lors, l'anthropométrie judiciaire devient le bertillonnage.

Bertillon peaufine sa méthode, centralise les données de la France entière et forme les policiers. À l'issue d'une formation sur la prise de mesures, un brevet est délivré. Les polices du monde entier s'intéressent à cette méthode, Bertillon devient aussi célèbre que Pasteur.

Le portrait parlé est la description parfaite de chaque caractère qui individualise le visage : le front, le nez, l'oreille droite, la couleur des cheveux et celle de l'iris. Il tient en une dizaine de mots soigneusement appropriés pour permettre de " reconnaître " instantanément un individu au milieu d'une foule.
Extrait de portrait parlé : " taille 1,80 m, cheveux blond clair, nez busqué, base abaissée, oreille triangulaire, oeil assez clair ".