Le Monde de Franquin
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La science du trait chez Franquin
 
Les mouettes rieuses © Marsu
 
Les voici les fameuses mouettes rieuses chères à Franquin ! Elles virevoltent comme jamais ! Selon toute vraisemblance, elles n’ont pas encore goûté à la morue aux fraises préparée par Gaston. Malheureusement pour elles, cela ne saurait tarder : sous le pinceau de Franquin, l’oiseau rivalise d’agilité et d’adresse. Et c’est tant pis pour elles... et c’est tant mieux pour nous. Sans la singulière recette de Gaston, nous aurions été privés de la mine — ô combien pathétique ! — de cette mouette hirsute à la digestion quelque peu contrariée (ci-contre).

Retour à l’image principale... Ne paraît-elle pas vraiment s’animer sous nos yeux, dans sa totalité ?  Pour réussir ce tour de force, Franquin n’a pas ménagé ses effets : il a d’abord resserré le champ au centre de l’image tout en compressant la perspective. Il en résulte que les joyeuses et souriantes protagonistes (elles ne sont pas mouettes rieuses pour rien) s’ébattent dans un espace restreint, amplifiant l’impression de vélocité de leur vol chaotique. Ensuite, Franquin s’est employé à représenter le nombre : pas moins de dix mouettes tournoient... Bien qu’il n’y en ait pas deux montrées sous le même angle (!).

En revanche, toutes (les quatre retardataires, au loin, comprises), ont les yeux, brillants de convoitise, rivés sur le morceau de nourriture en suspension dans l’air. Ces deux derniers artifices, conjugués aux précédents, renforcent l’impression générale d’un mouvement concentrique et papillonnant de l'ensemble. Enfin, fidèle à la réalité, la mise en couleur accentue le relief en donnant un velouté à l’image. Reste l’exceptionnelle vivacité du dessin de Franquin, assortie d’une étude anatomique très poussée des battements alaires... Autant d’ingrédients qui concourent à faire de la recette de Franquin une toute autre réussite que celle de Gaston. Ce ne sont pas les mouettes qui nous démentiront.